Sens et confiance, une rime riche
Une très grande majorité des salariés estime que leur travail a du sens. Mais, dans le même temps, le manque de sens est la première cause de démission. Aux sources d'un paradoxe bien français.
Bienvenue dans cette nouvelle Newsletter de Zevillage. Je suis Xavier de Mazenod. Je vous envoie chaque jeudi, dans votre boîte mail, des idées et des trouvailles pour comprendre ce que nous réserve le futur du travail et pour vous aider à travailler mieux et vivre mieux.
Avant, on parlait de changer la vie. Collectif, révolutionnaire, peut-être naïf. Aujourd’hui on parle de changer sa vie. Personnellement, solitairement, urgemment. C’est le symptôme d’une profonde mutation : les Français ne se sont jamais posé autant de questions sur le sens de leur travail qu’en ce moment.
Pourquoi maintenant ? Trois raisons majeures exposées par Romain Bendavid, expert associé à la Fondation Jean-Jaurès, dans l’étude qu’il vient de publier, Voyage à travers le sens.
Première raison : la crise sanitaire, le confinement et le télétravail, ont forcé les salariés à un moment d’introspection rare. Beaucoup se sont posé la question : “Pourquoi je fais ce job ?” Et devinez quoi ? Ils n’ont pas vraiment trouvé de réponse convaincante en revenant au bureau.
Deuxième raison : les cadres deviennent plus nombreux que les ouvriers. Avec plus de qualifications, les horizons se dégagent. Et donc, on peut se permettre de demander du sens, au lieu de juste trouver un boulot.
Troisième raison : le contexte sociétal est plus large. On se regroupe par valeurs, par croyances. L’entreprise est devenue une des rares structures qui nous force à quitter notre bulle. Donc on cherche à retrouver du sens là-dedans.
La bonne nouvelle c’est que 79% des Français affirment exercer un travail qui a du sens. En même temps, la perte de sens demeure la première raison de démission chez les cadres. C’est un paradoxe qui en dit long : en surface tout va bien. Quand on creuse, c’est beaucoup moins reluisant.
Pourquoi ? Parce que les structures qui les emploient asphyxient les cadres.
La France souffre d’une obsession chronique du contrôle. Reporting excessif, confiance insuffisante, hiérarchie verticale, normes à n’en plus finir. Résultat : les salariés se sentent interchangeables. Pire, ils perdent peu à peu la conviction que leur travail sert à quelque chose. Je ne m’étends pas sur le sujet, vous connaissez le concept des bullshit jobs.
Et puis il y a la reconnaissance. Celle-là, c’est notre talon d’Achille national. Seulement 47% des actifs français estiment que leurs efforts sont reconnus et récompensés. En Allemagne, c’est 61%. Aux Pays-Bas, 67% !
Encore une bonne nouvelle : il existe des antidotes. L’aménagement du temps de travail, d’abord, comme le télétravail ou la semaine de quatre jours. Pas par fainéantise, mais parce que ça laisse de l’espace vital… à la vie. Et 82% des cadres qui télétravaillent s’opposent d’ailleurs farouchement au retour au bureau.
Il y a aussi l’envie que l’entreprise s’implique dans la société : 82% des salariés pensent que l’employeur doit y jouer un rôle. Cela crée du collectif, cela redonne du sens.
Et puis, il y a ceux qui cassent le jeu. Deux millions de Français ont changé de métier en cinq ans. D’autres se jettent dans l’associatif. Ils choisissent de se réapproprier leur histoire professionnelle.
Ces solutions sont utiles. Mais elles restent individuelles, elles ne suffisent pas.
Ce qu’il faudrait vraiment, c’est que les organisations comprennent enfin que la confiance n’est pas un luxe mais un besoin. Que reconnaître le travail n’est pas juste gentil, c’est stratégique. Que la verticalité étouffante, ça coûte cher, en démissions et en perte de performance.
Le vrai changement selon l’auteur ? Il arrivera le jour où on aura compris que transformer le travail, c’est aussi transformer la démocratie. Que l’érosion du sens au travail et l’érosion du lien civique, ne sont pas dûs au hasard.
Ça peut paraître ambitieux. Peut-être. Mais pour redonner un sens durable au travail, il faut au moins essayer la confiance.
😱 Même pas peur
Vingt-cinq pour cent seulement des administrateurs d’entreprise déclarent que les risques géopolitiques et/ou macroéconomiques sont un sujet prioritaire. Recettes pour affronter ces risques.
👸 Les femmes, des hommes comme les autres
Les programmes de “leadership au féminin” sont voués à l’échec. Parce que l’alternative proposée est faussée : faire adopter aux femmes des codes masculins en s’affirmant davantage, ou les enfermer dans des stéréotypes féminins.
🤖 Et ben voilà !
Amazon espère remplacer 600 000 travailleurs américains par des robots. Les pertes d’emplois pourraient réduire de 30 % le prix de chaque article acheté d’ici 2027.
😰 Les invisibles
Enquête sur les “cassos”, ces jeunes ruraux dont le quotidien est fait d’instabilité entre de l’inactivité et des emplois en intérim ou du”travail au black”. Pire : “Cassos” n’est pas une fonction objective, c’est un stigmate qui finit parfois par s’intérioriser.
😮 L’Ukraine, laboratoire vivant
La guerre en Ukraine stimule (et permet) une mutation rapide de la société dans tous les domaines. Le ministre du numérique d’Ukraine est ainsi… le numéro 2 du gouvernement. Sa politique “d’État dans un smartphone” est unique au monde.
🥶 Ils sont là !
Certains leaders peuvent avoir tendance à croire que les autres leur sont inférieurs. Cette rivalité narcissique est associée à un management abusif. Comment s’exprime-t-elle ? Comment l’empêcher afin de protéger les salariés ?
👍 L’IA est enfin utile
La majorité des travailleurs de la génération Z (âgés de 18 à 28 ans) utilisent ChatGPT… pour se détendre au travail. Et 40% de ces GenZ parlent à des chatbots IA pendant au moins une heure chaque jour.
Vite dit
Payer pour travailler ? 🌀 Surprenant indicateur de paupérisation 🌀 La magie n’est pas dans le prompt pour utiliser l’IA 🌀 L’IA fait du mal… à Wikipedia 🌀 Les tiny teams sont là.
En 1972, Anne Chopinet, 19 ans, est reçue major au concours d’entrée à l’école Polytechnique qui vient d’admettre les femmes. Interview, un poil sexiste, de la lauréate.
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Xavier, merci pour cette livraison très réussie, fluide et nourrissante.