Recettes pour accomoder les seniors
Le jeunisme au boulot pousse les vieux vers la sortie. Contreproductif. Les entreprises gagnantes savent que les seniors représentent un capital humain.
Bienvenue dans cette nouvelle Newsletter de Zevillage. Je suis Xavier de Mazenod. Je vous envoie chaque jeudi, dans votre boîte mail, des idées et des trouvailles pour comprendre ce que nous réserve le futur du travail et pour vous aider à travailler mieux et vivre mieux.

Laetitia Vitaud vient de publier L’Atout Âge aux éditions Eyrolles. Un livre RH qui ne fait pas semblant : il traite le vieillissement au travail non pas comme un problème comptable, mais comme un levier stratégique.
Le constat est simple : cinq générations cohabitent aujourd’hui dans nos entreprises. Ceux qui savent composer avec cette diversité ne se contentent pas de “faire du social” mais gagnent en robustesse, en transmission et en innovation. Les chiffres sontéloquents : explosion du nombre des “ni en emploi ni en retraite”, allongement des carrières, inadaptation criante des pratiques managériales.
Ce qui frappe d’abord, c’est l’aspect opérationnel du livre. Pas de grandes théories fumeuses mais des pistes concrètes pour les DRH et les COMEX. Comme : dépolluer les annonces de recrutement des biais âgistes ; contrôler l’IA, qui trie les CV, pour débusquer les discriminations invisibles ; passer d’un recrutement fondé sur l’équation diplôme + âge + poste, à une véritable approche par compétences.
Laëtitia n’hésite pas à aller chercher dans les angles morts du sujet. Des millions de salariés, par exemple, sont des aidants. Ils développent ainsi des compétences incroyables dont la gestion de crise, la coordination, l’aisance numérique. Plutôt que de les ignorer, pourquoi ne pas les valoriser ? Le télétravail, également, peut devenir un outil d’inclusion massive, notamment pour les femmes de 55 à 64 ans.
Autre proposition concrète: valoriser les “boomerangs” (ces salariés qui reviennent dans l’entreprise après l’avoir quittée), professionnaliser le job sharing, inventer des parcours de réintégration. L’arsenal est généreux, compatible avec la flexibilité au travail vue comme une solution : semaine de quatre jours, télétravail, saisonnalité du travail…
Sur le fond, Laëtitia s’attaque à un dogme tenace : l’innovation serait l’apanage des jeunes. Faux, rétorque-t-elle, études à l’appui. L’innovation dépend des cycles économiques et des contextes. La diversité d’âges est un moteur... si l’on crée une culture inclusive. L’appel au stewardship mindset – cette vision de long terme où l’on se perçoit comme gardiens temporaires plutôt que propriétaires – donne une vraie colonne vertébrale éthique à la vision.
Le livre est structuré en “64 clés” avec “Trois leçons à retenir” chacune. Très pédagogique pour les dirigeants.
Comment mettre en œuvre ces recommandations. Que répond-on concrètement aux équipes qui redoutent la “séniorisation” des postes clés ? Aux syndicats qui y voient un risque de blocage des trajectoires ? Le livre esquisse des pistes (mobilités latérales, temps partiels ambitieux, partages de poste) pour la mise en œuvre. Il y a matière pour un second tome.
Un guide solide, utile et plein d’idées pour les DRH et COMEX qui veulent transformer l’âge en avantage compétitif. Boussole éthique et bonnes pratiques complètent cette boîte à outils.
À lire. Puis à faire vivre en atelier avec les partenaires sociaux.
📚 L’Atout Âge de Laetitia Vitaud, Eyrolles, 280 p.
Pour info
Le taux d’emploi des seniors remonte en France mais reste inférieur à la moyenne européenne
Un tiers des seniors se disent inquiets quant à leur avenir professionnel.
😎 Les modes passent
La RSE ne vous a-t-elle jamais agacé, voire insupporté ? Ses injonctions souvent moralisatrices, l’énergie et le boulot qu’elle demande pour, au final, souvent aboutir en outil de communication externe ont fini par fatiguer du monde.
😰 La tech n’était pas sensée nous libérer ?
Dans la Bay (The Bay de la tech, entre San Francisco et San José)) une nouvelle norme de travail s’impose : travailler de 9h du matin à 9h du soir, six jours par semaine, soit 72 heures hebdomadaires. Finalement, les Chinois sont des petits joueurs.
😳 Mets les patins !
Pourquoi s’embêter avec des politiques de santé au travail ou de RSE, alors que la solution qui combine productivité et bien-être existe : porter des chaussons au travail. Retour forcé au bureau et paire de pantoufles, le secret pour réussir.
💋 Télétravail et politique nataliste
Une étude a établi que les couples travaillant à domicile au moins un jour par semaine ont eu plus d’enfants, et prévoient d’en avoir davantage à l’avenir, que ceux qui ne travaillent pas à domicile. Télétravail ou salles de sieste, les entreprises vont devoir choisir.
👿 Ils avouent enfin !
Selon une autre étude, un quart des cadres dirigeants espéraient pousser des salariés vers la porte avec leur politique de retour au bureau (RTO). Dans le même temps, un professionnel des ressources humaines sur cinq admet que la politique en vigueur au bureau vise à inciter le personnel à démissionner.
😇 Petit farceur
Un pirate a affiché une image sur les écrans des salles de réunion des bureaux de Ford pour protester contre la politique de retour au bureau. L’image représentait le PDG Jim Farley avec un grand cercle rouge barré sur son visage et les mots “(Expletive) RTO”
😏 Non, non, je ne bouge pas
Après les vagues de démissions plus ou moins bruyantes, voilà celle du job hugging pour ceux qui se cramponnent au travail : le contexte économique et géopolitique fait plus peur que l’ennui au boulot. Une plaie pour les entreprises qui se trimballent des boulets démotivés.
Vite dit
Il serait pt’êt’ temps de se réveiller 🌀 Le pédibus c’est ringard, adoptez le bike bus 🌀 Obliger les habitants d’une ville à abandonner leurs smartphones ? 🌀 Vers la guerre civile en entreprise ? 🌀 Elon Musk ne croit plus aux voitures indivuelles ?
On n’allait pas louper le nouveau Karim Duval quand même !
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Merci.
Merci encore Xavier pour cet excellent numéro. Grâce à toi j'ai dégusté cet article du Point sur les 72 heures de travail hebdomadaire dans la Silicon Valley. Ce que l'article ne dit pas, c'est : comment sont utilisées ces heures ? Est-ce que lorsque je fais une partie de babyfoot dans l'open space, je travaille ? Est-ce lorsque je fais et refais la même tâche par manque d'attention, je travaille ? Bref, quantité ne fait pas qualité.