Travail hybride : la nouvelle énigme du sphinx
Les animaux hybrides étaient des animaux fabuleux. Le travail hybride n'est pas un monstre, il a besoin de créer ses mythes. Deux chercheurs posent des questions et... des réponses.
Bienvenue dans cette nouvelle Newsletter de Zevillage. Je suis Xavier de Mazenod. Je vous envoie chaque jeudi, dans votre boîte mail, des idées et des trouvailles pour comprendre ce que nous réserve le futur du travail et pour vous aider à travailler mieux et vivre mieux.

Deux chercheurs américains en management se sont penchés sérieusement sur le bilan du travail hybride avec une enquête de terrain. Une étude relatée dans un long article de HBR.
Certes, le secteur analysé est étroit (secteur financier) et seules de grandes entreprises sont citées. Si les chercheurs partent de l’a priori que le travail hybride est nuisible, ils concluent en donnant des solutions aux problèmes créés par la distance.
L’état des lieux est sans appel : les grandes entreprises comme JPMorgan, Amazon, Boeing, Walmart... reviennent toutes à la semaine de cinq jours au bureau. Et pour cause. Une enquête KPMG de 2024 auprès de 1 325 PDG de grandes entreprises le confirme : 83 % d’entre eux prévoient d’imposer un retour au bureau dans les trois ans à venir.
Les raisons ? Selon les auteurs, elles s’accumulent. Le travail hybride détruit la collaboration. Les nouvelles recrues ne trouvent personne à qui s’adresser pour apprendre les ficelles du métier. Quand elles demandent de l’aide en ligne, leurs messages restent souvent sans réponse parce que les collègues sont “focus” sur leurs indicateurs clés de performance. Les réunions virtuelles se multiplient, deviennent interminables, et les participants regardent leurs mails pendant l’appel. Les promotions se font sur la base de la performance individuelle, pas sur la capacité à manager ou à collaborer. La culture d’entreprise se fracture en deux : celle des anciens (pré-Covid) et celle des nouveaux.
Et voilà le truc : le travail hybride ne change rien à cette situation. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas hybride mais mal foutu. Les entreprises ont réduit leurs mètres carrés et mis en place du hot-desking, une organisation sans bureau attribué. Résultat : quand les gens reviennent au bureau, ils ne trouvent pas de place à côté de leurs collègues. Les “journées d’ancrage” où tout le monde est là en même temps ? Impossible d’en organiser si on manque de bureaux. Et puis les managers ont laissé chacun venir comme il veut, certains jours. Résultat : plus personne ne se croise. C’est juste du télétravail sans les avantages, avec les inconvénients du bureau en prime.
À faire, dès lundi
Heureusement, selon les auteurs, il existe des solutions concrètes. Elles sont inspirées par ceux qui réussissent : Atlassian, GitLab, Shopify. Des boîtes qui fonctionnent 100% en distanciel mais qui ont compris comment maintenir la cohésion.
D’abord, créer des règles simples et les appliquer sans exception : caméra allumée en réunion (sinon on ne participe pas), participants limités aux parties prenantes concernées, réunions post-réunion interdites. Demander aux collaborateurs de s’engager sur des heures de disponibilité chaque jour. Et le plus important : sanctionner ceux qui ne les respectent pas. Une règle non appliquée par quelques-uns, peut être ignorée par tous les autres.
Ensuite, il faut réinventer complètement l’évaluation de la performance. Il faut inclure dans les KPI (indicateurs de performance) la capacité à aider les collègues, mentorer les nouveaux, collaborer. Ne pas se contente pas du résultat individuel : l’aide apportée aux collègues compte dans les critères de promo et de bonus.
Instituer des jours d’ancrage obligatoires où tout le monde est présent. Deux jours par semaine minimum pour les équipes qui collaborent peu, trois pour les autres.
Enfin, tisser intentionnellement un lien social. Sans espérer que cela arrive tout seul. Organiser des déjeuners de travail entre équipes qui interagissent, avec plan de table mélangé. Organiser des promotions de nouvelles recrues pour qu’elles se lient entre elles. Sans oublier des parrainages systématiques avec un mentor expérimenté.
Les entreprises qui ne peuvent pas accueillir tout le monde au bureau devront gérer différemment. Mais une chose est sûre : continuer à faire du travail hybride sans rien changer, c’est accepter de perdre en collaboration, en apprentissage, en culture. Et finalement, en performance.
Voici ce que l’on peut faire dès lundi : auditer les vrais problèmes dans l’entreprise : réunions trop nombreuses ? Recrutement qui traîne ? Salariés qui partent ? Culture qui s’effrite ?
Puis choisir une règle simple à appliquer strictement pendant un mois. Sans exception. À lire
Ce PDG estime que l’on se trompe sur le travail hybride. “Il ne s’agit pas d’imposer des jours de présence au bureau”, explique-t-il.
Je pivote, comme on dit dans les startups
À la question de la semaine dernière : Voulez-vous que je fasse évoluer la ligne éditoriale de la newsletter, vous êtes 64% à avoir répondu “ Oui, trop bien je suis fan”. Parfait, c’est noté, je m’y mets.
Vous êtes seulement 18% à avoir voté “Ah non, ne change rien”. Promis, je ne change pas tout. Pour les 18% partisans du “Bof, je ne sais pas trop”, je vous laisse réfléchir.
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Vivons-nous un âge d’or de la stupidité ? 🌀 Junk pub avec IA pour junk food 🌀À la maison pour Noël ? 🌀 Prends l’oseille et tire-toi.
On va encore dire que les Français ne veulent pas travailler !
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