Les managers sont-ils des tyrans ?
Plusieurs livres, recensés dans un article, présentent le management comme un système d'oppression avec des méthodes apparentées... au nazisme. Quand l'idéologie masque la réalité.
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Droit de suite
En complément de l’éditorial de la semaine dernière sur l’égalité femmes-hommes, voilà une annonce qui va dans le bon sens. La ministre des Solidarités, Aurore Bergé, a annoncé la création en 2025 d’un “nouveau droit” pour les familles afin que les jeunes parents puissent s’arrêter de travailler pour garder leur bébé, tout en étant mieux indemnisés.
La critique, parfois sévère, du management n’est pas neuve. Il y a quelques années, l’article, puis le le livre, d’Isaac Getz, et le documentaire qui lui a donné de la notoriété, Le Bonheur au travail, prêchaient pour une libération de l’entreprise avec un aplatissement des hiérarchies. Certains extrémistes proposaient alors un management tellement horizontal qu’il prévoyait une suppression des managers.
Depuis, je suis tombé sur un long article de Martin Richer qui analyse le propos de plusieurs auteurs diabolisant littéralement le management.
Il commence par souligner la perception négative du management en France, en faisant référence au livre de Gary Hamel, The Future of Management, publié en français sous le titre un peu infidèle : La fin du management.
Martin Richer observe l’usage du point Godwin dans ces livres sur le management. Rappelons que ce concept postule qu'à mesure de la progression d’une discussion, la probabilité d'une comparaison impliquant les nazis ou Hitler se rapproche de la certitude. Ce concept est utilisé pour illustrer comment le management en France a atteint un point où il est souvent comparé de manière injustifiable aux régimes totalitaires extrêmes.
Martin Richer prend trois exemples d’ouvrages dans lesquels les auteurs assimilent les pratiques de gestion modernes au totalitarisme, et plus précisément au nazisme : le livre du psychiatre Christophe Desjours, Souffrance en France (1998), celui de l’historien Johann Chapoutot, Libres d’obéir ; Le management, du Nazisme à aujourd’hui (2020) et, enfin, l’ouvrage de la journaliste Violaine des Courières, Le Management totalitaire (2023).
Faute de place, je vous passe les solides critiques détaillées de chacun de ces livres. Je trouve que la partie la plus intéressante de l’article de Martin Richer se situe plutôt dans l’équilibre qu’il trouve entre analyse lucide du management français et accusations de totalitarisme.
L’auteur soutient que la réalité du management en France, et ailleurs, est très éloignée de ces caractérisations extrêmes. Il met en évidence les aspects positifs de la gestion, tels que le dialogue avec les parties prenantes, les pratiques éthiques et le rôle des managers dans l'équilibre des diverses demandes. Le texte mentionne également d’autres ouvrages consacrés à la relation entre gestion, démocratie et totalitarisme, utilisant souvent ces termes de manière vague ou métaphorique.
Certes, le salariat induit une certaine perte de liberté. “ Le lien de subordination, qui vertèbre notre code du travail, rappelle Martin Richer, représente les conditions matérielles (salaire, statut…) reçues en échange de l’abdication d’une partie de notre liberté, soumise aux prescriptions du chef d’entreprise ou à l’autorité qu’il délègue à ses managers.”
Voir dans cette abdication consentie une oppression et décrire les managers comme des tyrans est un poil abusif. D’autant que les méthodes de management ont légèrement évolué depuis les peintures de Zola ou Courteline.
L’article le rappelle : en octobre 2023, un sondage OpinionWay met en évidence que 70% des Français se sentent épanouis au travail. Cette proportion monte à 78% dans les entreprises qui pratiquent le management collaboratif.
Qu’on les appelle manager, coach ou leader, il y aura toujours un chef et des relais de décisions pour organiser les équipes. Les mentalités évoluent et l’on sait que ni le leader charismatique autoritaire (ou caractériel), ni le manager cramponné à la verticalité, ne sont efficaces. Les dirigeants compétents le savent (et le pratiquent) : manager n’est pas appliquer un process rigide, c’est gérer des relations humaines au service d’un but. L’étymologie de manager c’est à la fois “avoir en main” et “prendre par la main”.
Martin Richer cite l’historien François Furet : ce sont les utopies qui produisent des systèmes totalitaires. Le remède est fourni par le réel. En management, cela s’appelle le pragmatisme.
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Jusqu’où ira la diabolisation du management ? par Martin Richer
Le travail en France, entre mythe et réalité, sondage OpnionWay (PDF, octobre 2023)
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Guide Tiers-lieux et collectivités
Les tiers-lieux sont près de 3 500 en France aujourd’hui, dont 60% en dehors des métropoles et un tiers en milieu rural. Ils forment l’autre visage de la France qui innove.
Les collectivités territoriales, premiers partenaires des tiers-lieux, ont un rôle essentiel à jouer pour accompagner ce mouvement et repenser, plus fondamentalement, la relation entre les administrations et la société civile. France Tiers-lieux publie donc un guide pour les aider à mener à bien ces projets.
🟥 Télécharger le guide Tiers-lieux et collectivités (PDF, 124 p.)
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Il faut aider les hérissons ! 🌀 Dis moi comment tu contrôles tes clients, je te dirais qui tu es 🌀 Vous connaissez le lobby de l’agrivoltaïsme ? 🌀 Infobésité : le retour .. puissance 1000, avec l'IA générative 🌀 Comique rural.
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