Exode urbain : il se passe des choses
L'exode urbain a été très médiatisé. En réalité, il n'est pas massif et les villes ne se vident pas. Pourtant, il se passe des choses comme le montrent les résultats d'une étude.
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Vous en avez soupé, depuis deux ans, des reportages et des articles sur ces cadres qui plaquent tout pour changer de vie et s’installer en Bretagne ou dans le Perche ? Vous avez l’impression que les villes se vident au profit des campagnes ?
En réalité, on n’observe pas de bouleversement, contrairement à ce que la surexposition médiatique pourrait laisser croire. Mais pas mal de changements quand même.
La semaine dernière, Sylvain Grisot, urbaniste et fondateur de Dixit que nous citons souvent ici, organisait un webinaire avec Aurélie Delage et Anaïs Collet, actrices de la double enquête, qualitative et quantitative, "L'exode urbain post-confinements liés à la Covid 19". Une étude commanditée par le PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture) et le Réseau Rural.
Ce travail de recherche, lancé en juin 2021, est bienvenu pour rationaliser l’observation de ce phénomène d’exode urbain.
Pour la collecte des données des deux parties quantitatives de l’étude, la méthodologie est assez originale. Pas de recherches dans les bases de l’INSEE mais plutôt de La Poste (changements d’adresses déclarées), et des annonces des plateformes le Bon coin, meilleursagents.com ou seloger.com.
On pourra retrouver les grandes conclusions de l’étude dans les articles en lien ci-dessous, sur le site ou dans la revue du Réseau rural ou sur le site du PUCA.
Pendant le webinaire, Aurélie Delage et Anaïs Collet ont mis en évidence différents types de comportements observés dans leur étude :
l’investissement dans la pierre est évident, suivi ou non d’installations pérennes
les déménagements durables (validés par les changements d’adresse à La Poste) reproduisent la même carte qu’avant la Covid avec des flux partants d’Ile-de-France vers la Bretagne et le Sud-Ouest et vers les agglomération du pourtour du Bassin parisien. Un constat que les territoires sont inégalement attractifs
les profils des nouveaux arrivants sont plus variés que peuvent le laisser penser les reportages. Ils sont principalement constitués :
de retraités et de pré-retraités qui renforcent les populations de zones de villégiatures ou un retour dans leur territoire d’origine
de ménages de petite classe moyenne qui nourrissent le flux de péri-urbanisation rurale. Ils sont à la recherche de maisons individuelles avec jardin mais restent dépendants du travail en présentiel (navetteurs)
de cadres supérieurs alliant le télétravail et une grande mobilité (la population très présente dans les médias) dans des lieux de villégiatures (Bretagne, Parcs naturels régionaux et Sud-Ouest)
de familles en rupture avec leur vie antérieure ; ils intéressent les élus locaux car ils s’investissent dans les territoires
et, enfin, de flux invisibles de marginaux (peu nombreux sauf dans Sud) qui se mettent à distance de la pression économique des métropoles pour se loger à pas cher, souvent en habitat léger.
La géographie des installations n’est pas homogène sur le territoire français. Et l’on observe une forme de regroupements affinitaires. On assiste par exemple à la “clubisation” d’une population aisée. Elle manifeste sur place des attentes de ses modes de vie urbains et n’accepte pas certaines formes de nuisance (“Les oeufs bio mais pas le chant du coq” résume Sylvain Grisot qui organisait la conférence). Une catégorie qui privilégie la Bretagne, la Drôme ou le Lot.
Autre forme d’affinité : les regroupements communautaires fondés sur la proximité dans de nouveaux hauts-lieux de la marginalité, moins connus - et moins chers - que la Drôme. Comme les Pyrénées audoises où ils se regroupent en “grappes” partageants des valeurs : circuits courts, médecines alternatives, enseignement alternatif… voire complotisme anti-vax.
Quelles leçons tirer de cet “exode” ?
En conclusion, les deux participantes du webinaire ont partagé plusieurs observations.
Pour commencer, est-ce que la qualité de vie de ces migrants s’est améliorée après l’exode ? Oui. Pour autant, ce n’est pas si simple de travailler et ils doivent accepter des formes de déclassement très nettes.
Deuxième observation : il est difficile de se débarrasser de la dépendance aux métropoles pour le travail.
Troisième observation : les effets de ces micro-démarches pour les collectivités accueillantes, objets de beaucoup d’attention par les élus.
La fréquentation des commerces locaux n’est pas toujours naturelles pour les pendulaires qui ont tendance à faire leurs courses là où ils travaillent. Et la participation à la vie locale n’est pas automatique. Ceux qui ont entrepris des travaux de rénovation de leur habitation n’ont pas encore le temps de s’intégrer. A noter : on observe aussi des logiques de réseaux et d’entre-soi, peu favorables à l’établissement de liens locaux.
Autre constat : les arrivées de familles ne sauvent pas forcément les écoles traditionnelles, en particulier à cause de la scolarisation dans des écoles alternatives ou dans l’école à la maison.
L’effet loupe des médias sur les marchés immobiliers est à nuancer car ces marchés sont étroits en ruralité : il n’y a plus rien à vendre depuis septembre 2020, avec des conséquences de hausses des prix qui compliquent parfois l’accès à la propriété pour les locaux.
Certains élus ont vu le développement d’offres opportunistes de promoteurs en ruralité. Or, trouver des terrains constructibles est de plus en plus difficile à cause de la loi Climat et de l’objectif de “zéro artificialisation nette des sols”.
Le marché des constructions neuves se rétrécit donc et celui des bâtiments anciens est à l’arrêt : dans le territoire analysé, il ne reste à plaire que des biens peu attractifs. Les autres ayant été récupérés depuis deux ans par des ménages qui les réhabilitent (Bac +5 pour la moitié d’entre eux !).
Après un fort engouement, cet exode urbain a engendré des phénomènes de désillusions chez beaucoup d’élus. Ce qui devrait les obliger à redéfinir des stratégies d’attractivité : ne plus compter sur les arrivées providentielles mais jouer sur leurs avantages internes. Les communes qui s’en sortent ont réussi à regrouper leurs services et à créer des synergies pour renforcer les services publics locaux.
A suivre avec la publication du rapport final en septembre.
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En 1959, un étudiant américain, au look de banquier des années 80, invente la trottinette à moteur.
Et voilà, c’est fini pour cette semaine.
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